Certaines entreprises n’hésitent pas à faire appel aux services de détectives privés pour diverses raisons : vérification de CV, enquête de moralité, enquête à la suite d’un vol en interne… les motifs sont nombreux. Cette pratique encore méconnue en France tend à prendre de l’ampleur. Quel est l’avantage pour les entreprises de recourir à ce genre de service ? Vous verrez que ces pratiques très encadrées par la loi comportent certaines limites à ne pas franchir. Enquête.
Pourquoi faire une enquête de pré-embauche ?
Faire appel à un détective privé dans le cadre d’un recrutement, l’idée peut paraître étrange, voire un peu extrême. Mais on observe qu’un nombre grandissant d’entreprises n’hésitent pas à recourir à ce genre de service, et à effectuer ce que l’on appelle une enquête de pré-embauche. D’après le SNARP (Syndicat national des agents de recherche privée), environ 1000 professionnels exerceraient de telles pratiques en France.
Leur mission principale consiste à s’assurer de la véracité du parcours professionnel d’un candidat, et à vérifier que le CV ne contient pas de fausses informations. En effet, on constate qu’un grand nombre de CV en comportent, par exemple, en faisant part de fausses expériences à l’étranger, de rémunérations augmentées, de responsabilités exagérées ou bien de périodes de chômage cachées. Les détectives privés se voient également confier la tâche de vérifier les diplômes obtenus à l’étranger, face auxquels les entreprises sont souvent perdues.
Vous savez sans doute que des informations inexactes fournies par le salarié lors de l’entretien d’embauche ne constituent pas un motif de licenciement, sauf si l’employeur parvient à démontrer que l’employé n’a pas les compétences nécessaires pour occuper le poste pour lequel il a été embauché. Seuls les agissements frauduleux, comme une falsification de diplôme pour une profession réglementée, peuvent amener à la résolution du contrat de travail. Ainsi, c’est l’une des principales raisons pour lesquelles les entreprises préfèrent s’assurer de l’authenticité des informations avant de procéder à l’embauche, et ce, grâce aux services de détectives privés.
Une pratique encore peu commune en France
Au vu des difficultés que les candidats peuvent rencontrer sur un marché de l’emploi de plus en plus compétitif, certains n’hésitent pas à améliorer leur CV. Ainsi, certains recruteurs franchissent le pas et font mener des enquêtes de pré-embauche pour s’assurer que le passé des candidats correspond à leurs dires. Cela concerne en grande partie les postes à responsabilité, comme les cadres dirigeants ou les responsables financiers.
Même si les entreprises qui font appel à des détectives privés pour recruter sont encore rares en France, il est tout à fait normal d’avoir recours à cette pratique dans des pays comme les États-Unis, l’Allemagne ou encore la Suisse, ou la vérification des informations est presque systématique.
Dans notre pays, les recruteurs comptent sur l’entretien pour démasquer d’éventuels mensonges. Ainsi, les entreprises de détectives privés françaises sont rarement sollicitées par les entreprises dans le cadre du recrutement. Elles le sont davantage pour des affaires de fraude, d’espionnage industriel, de concurrence déloyale, etc.
Quelles sont les limites de cette pratique ?
Bien entendu, il s’agit d’une profession très encadrée, qui ne doit pas basculer dans le voyeurisme ou constituer une atteinte à la vie privée.
Ainsi, il est obligatoire d’informer le candidat des investigations dont il fait l’objet. Le détective professionnel peut alors recourir à une recherche d’informations sur le web, notamment sur les réseaux sociaux, en consultant les registres prud’homaux, la presse, ou bien en prenant contact avec d’anciens collègues, etc. Toutefois, il est tout à fait illégal de rapporter des faits que le détective aurait pu observer lors d’une surveillance : bagarre, consommation de stupéfiants, etc.
En effet, les informations collectées et transmises à l’employeur doivent être pertinentes vis-à-vis de l’emploi sollicité. Par exemple, pour recruter un chauffeur, un employeur peut demander la vérification de l’authenticité de son permis de conduire. Le dirigeant d’une banque a le droit d’exiger à un candidat l’extrait de son casier judiciaire, etc. Ces éléments concernent directement le poste, en non la vie privée du candidat.
Les sociétés agréées secret défense, dans le domaine du nucléaire par exemple, font exception à la règle. Elles sont autorisées à vérifier la réputation d’un candidat au moyen d’une enquête de moralité, et s’assurer que ce dernier ne consomme pas de stupéfiants ou ne commet pas d’actes immoraux. Toutefois, ces enquêtes peuvent être effectuées par les renseignements généraux uniquement, et ne doivent pas être confiées à des services privés.
Que pensez-vous de ce genre de pratique ? Avez-vous déjà eu recours aux services d’une agence de détectives dans le cadre d’un recrutement ?
Rachel Villanueva, Investipole